vendredi 8 novembre 2013

Jorion, Toussaint et d'autres appellent à imposer le capital et annuler des dettes

 
BRUXELLES 06/11 (BELGA) =  Plusieurs personnalités atypiques de la gauche belge, parmi lesquelles Paul Jorion, Thierry Bodson, Eric Toussaint, Vincent Decroly et Georges Henri Beauthier, plaident dans une tribune commune pour une politique combinant taxation progressive du capital et annulation de dettes jugées illégitimes.
Evoquant ces deux voies censées permettre une réduction des inégalités - incarnées respectivement par l'économiste Thomas Piketty et le sociologue David Graeber-, les signataires se demandent "pourquoi choisir".
      Une partie de la dette publique est illégitime selon eux, car elle "est due en bonne part à la transformation de dettes privées, celles des banques notamment". Dès lors, "il faudra imposer l'annulation des dettes sous l'impulsion des mouvements sociaux".
      "Pour nous, imposition du capital et annulation des dettes illégitimes doivent faire partie d'un programme bien plus vaste de mesures complémentaires permettant d'enclencher une transition vers un modèle post-capitaliste et post-productiviste", affirment-ils.
      "Un tel programme, qui devrait avoir une dimension européenne tout en commençant à être mis en pratique dans un ou plusieurs pays, comprendrait notamment l'abandon des politiques d'austérité, la réduction généralisée du temps de travail avec embauches compensatoires et maintien du salaire, la socialisation du secteur bancaire, une réforme fiscale d'ensemble, des mesures pour assurer l'égalité hommes-femmes, le développement des services publics et de la protection sociale et la mise en place d'une politique déterminée de transition écologique", ajoutent-ils.
      Cette tribune a été publiée sur le site du Comité pour l'annulation de la dette du tiers monde 
 
 
 

mercredi 6 novembre 2013

Compte rendu de la dernière AG


 

Le 5 novembre, nous avons tenu notre assemblée générale.

 

Lors de celle-ci, nous nous sommes mis au courant de ce qui avait été discuté lors de la dernière réunion de coordination des comités d’audit citoyen de la dette. Retenons que pour l’instant, des comités sont actifs à Arlon, Marche –en-Famenne, Nivelles, Verviers, Liège, Bruxelles et bien sûr La Louvière. Un groupe se met sur pied pour un audit de la SNCB et certaines associations prennent des initiatives comme la réalisation d’un film sur Dexia, la réalisation d’une mallette pédagogique féminisme et d’un visuel « facture » qui exige au gouvernement de rembourser les femmes plutôt que les banques.

Le site Internet et les outils de communication vont changer pour correspondre à l’élargissement consécutif à la naissance de la coordination des comités d’audit de la dette. Le guide d’audit continue à être travaillé et les têtes de chapitres sont les suivants : contextualisation, sensibilisation, audits, constats et revendications. Le guide retravaillé sera disponible dans les jours qui viennent et on pourra faire des commentaires. Lié au contenu, il y a un débat à avoir sur la notion d’illégitimité de la dette à avoir au-delà du groupe de coordination.

Les prochaines activités de la coordination : site et guide devraient sortir fin novembre ;prochaine réunion du groupe méthodologie le 8 novembre à 14 h à Liège (lieu à confirmer) ;prochaine réunion de la coordination des comités d’audit le 27 novembre vers 18 heures à Namur (à confirmer) ;Le comité d’audit citoyen de la dette de la Région du Centre retient particulièrement la proposition d’une rencontre de toute la plate-forme (échanges entre les groupes locaux, infos sur le mode de fonctionnement, après-midi de discussion sur la dette illégitime et revendications communes) les 8 ou 15 février. C’est encore à l’état de proposition. Si cela se fait, le comité de la Région du Centre essaiera d’organiser une mobilisation particulière. Nous sommes aussi fortement intéressés par l’idée d’une action publique de la coordination des comités d’audit pour un avoir plus d’écho dans les médias et dans l’opinion publique.

Dernière info de la coordination : « Marianne » Belgique voudrait faire un dossier exclusif sur l’audit et la coordination va leur demander d’attendre.

 

Pour la Région du Centre :

-          Le 3 décembre, le comité d’audit de la dette et l’école des cadres de l’ASBL CEPRé organisent une matinée de réflexion sur les thèmes des crises financières, de la dette, des politiques d’austérité et de l’augmentation de la pauvreté. Un accent particulier sera mis sur l’austérité qui conduit à un appauvrissement général de la population, notamment par la mise en cause des droits sociaux et économiques fondamentaux. Nous toucherons par exemple au thème de l’affaiblissement général des politiques sociales, notamment celles menées dans les communes par les CPAS. Evidemment, nous discuterons aussi le volet alternatives et actions. Cette matinée vise les délégués syndicaux et militants des entreprises privées et du secteur non marchand qui participent à l’école des cadres du CEPRé mais elle sera ouverte à des TSE, aux travailleurs et militants des services publics et à toute personne désireuse de s’informer sur les thèmes que nous développons. Les oratrices et orateurs sont les suivants : Emilie Paumard du CADTM, Marco Van Hees de l’ASBL La Braise, Bernadette Schaeck du Groupe de défense des allocataires sociaux, Christine Mahy du Réseau Wallon de lutte contre la pauvreté. Vous êtes toutes et tous invités à participer à la préparation de cette matinée le 21 novembre à 9 h 30, dans les locaux de la FGTB/Centre, rue Henri Aubry, 23 à Haine-Saint-Paul.  

-          Lors de notre AG du 5 novembre, nous avons confirmé notre intention de travailler sur les impacts de la dette et des politiques d’austérité sur les communes. Notre intention est la suivante : concerner l’ensemble de la population à la défense d’un service public communal de qualité et accessible à toutes et à tous. Tout particulièrement, nous visons à analyser les répercussions de la dette et de l’austérité sur les politiques sociales, c’est-à-dire sur les CPAS. Nous allons rédiger un questionnaire qui pourrait la base pour des rencontres avec les CPAS de La Louvière, de Morlanwelz, d’Anderlues, de Soignies, d’Ecaussinnes, du Roeulx. Dans le prolongement, nous voudrions que ces rencontres aboutissent au moins à un débat public sur le thème des politiques sociales communales dans le cadre de la crise de la dette et de l’austérité imposée à l’ensemble des services publics. A travers ce thème, nous souhaitons mettre en lumière le fait que les femmes et les familles sont particulièrement touchées par les mesures d’austérité. Important aussi de déculpabiliser la population qui n’est pas responsable de la dette. Nous envisageons cette action en solidarité avec les luttes des travailleurs communaux A la réunion du 21 novembre, une première mouture du questionnaire à adresser aux CPAS sera proposée.

 

NOS DEUX PROCHAINES REUNIONS :

-         LE 21 NOVEMBRE A 9 H 30, RUE HENRI AUBRY, 23 A HAINE-SAINT-PAUL.

-         LE LUNDI 9 DECEMBRE A 18 H 30, DANS LES LOCAUX DE LA CGSP, RUE DU TEMPLE, 7 A LA LOUVIERE.

Taxer le capital ou annuler la dette: pourquoi choisir ?


 

France Arets (déléguée CGSP Enseignement Liège), Georges Henri Beauthier (avocat), Thierry Bodson (secrétaire général de la FGTB wallonne), Olivier Bonfond (économiste CEPAG), Yannick Bovy (réalisateur, militant syndical et associatif), Myriam Bourgy (CADTM), Sébastien Brulez (journaliste à La Gauche), Eric Corijn (professeur à la Vrije Universiteit Brussel), Nico Cue (secrétaire général Métallurgistes Wallonie- Bruxelles – FGTB), Vincent Decroly (ancien député indépendant), Marcela de la Peña (responsable de formations Le Monde selon les femmes), Jean Delval (directeur du Théâtre des Rues), Paul-Emile Dupret (juriste, Parlement européen, Groupe GUE/NGL), Xavier Dupret (chercheur associé Centre Pierre Naville -Université d'Évry-Val d'Essonne-), Pierre Galand (ex-sénateur, président du Forum Nord Sud), José Gotovitch (historien, professeur honoraire ULB), Denis Horman (LCR, journaliste à La Gauche), Paul Jorion (chaire Stewardship of Finance à la VUB), Alain Leduc (militant associatif, Bruxelles), Gilbert Lieben (secrétaire wallon de la Centrale générale des services publics wallonne - CGSP wallonne), Paul Lootens (secrétaire général Centrale Générale FGTB), Gilles Martin (éditeur Aden), Francine Mestrum (Global Social Justice), Céline Moreau (formatrice CEPAG), Christine Pagnoulle (présidente ATTAC Liège), Emilie Paumard (CADTM), Laurent Pirnay (secrétaire général adjoint de la CGSP wallonne), Daniel Piron (secrétaire régional de la FGTB Charleroi/sud-Hainaut), Daniel Puissant (membre du groupe de coordination d'ATTAC-Liège), Jean-François Ramquet (secrétaire régional FGTB Liège-Huy-Waremme), Danièle Ricaille (comédienne militante), Daniel Richard (secrétaire régional interprofessionnel de la FGTB de Verviers et Communauté germanophone), Pierre Robert (avocat), Claude Semal (chanteur, auteur, journaliste), Olivier Stein (avocat), Yannis Thanasekos (professeur de sociologie politique, ancien directeur de la Fondation Auschwitz), Jean-François Tamellini (secrétaire fédéral FGTB), Joël Thiry (secrétaire régional FGTB Luxembourg), Éric Toussaint (président du CADTM Belgique), Nicole Van Enis (membre de la coordination liégeoise Marche Mondiale des Femmes), Renaud Vivien (CADTM), Thomas Weyts (SAP).

 

A l’occasion de la sortie de deux livres importants, Dette 5000 ans d’histoire et Le Capital au XXIème siècle, Mediapart a eu l’heureuse idée d’organiser une rencontre entre leurs auteurs respectifs, David Graeber et Thomas Piketty. Leurs échanges sont accessibles en ligne[1].

Comment sortir de la dette, cette question centrale posée en préambule à ce dialogue est également au cœur des réflexions et de nos activités militantes respectives. C’est pourquoi nous avons souhaité donner un prolongement constructif à ces échanges en proposant le texte qui suit, fruit d’une réflexion collective qui explicite, commente, questionne et critique les points de vue et les arguments avancés par les deux auteurs.

Annuler la dette ou taxer le capital ?

Les échanges entre T. Piketty et D. Graeber tournent pour l’essentiel autour de la mise en regard des mérites respectifs de l’impôt sur le capital et de la répudiation de la dette publique. D. Graeber, s’appuyant sur une belle érudition historique et anthropologique, souligne que l’annulation de tout ou partie de la dette, privée ou publique, est une figure récurrente des luttes de classes depuis 5000 ans. Considérant que la dette est un mécanisme central de la domination capitaliste aujourd’hui, il ne voit aucune raison qu’il en aille autrement dans les années à venir.

T. Piketty estime pour sa part qu’on peut obtenir un allègement considérable du poids des dettes par un mécanisme fiscal de taxation des grandes fortunes qui serait plus juste socialement, car il éviterait de frapper les petits et moyens épargnants détenteurs (via les fonds communs de placement gérés par les banques et les compagnies d’assurance) d’une grande partie de la dette publique.

Sans que les deux interlocuteurs ne l’explicitent, on peut sans doute attribuer leur différend à des présupposés philosophiques et politiques opposés. Pour Graeber, de tradition anarchiste, l’annulation de la dette est préférable parce qu’elle ne suppose pas nécessairement de s’en remettre à l’État national, et encore moins à un État ou une institution supranationale : elle peut résulter de l’action directe des débiteurs (cf. le projet de « strike debt »[2] porté par Occupy Wall Street aux États-Unis), ou bien de la pression populaire imposant une décision à un gouvernement. Pour Piketty, de tradition social-démocrate, c’est une fiscalité mondiale sur le capital qui est nécessaire, et des mesures fiscales nationales portées par des gouvernements réformistes peuvent déjà permettre d’avancer.

Au vu précisément des arguments des deux auteurs, nous pensons qu’il n’est pas nécessaire de choisir entre imposition du capital et annulation de dettes, mais qu’il est judicieux de mettre en œuvre ces deux mesures simultanément.

Annuler la dette, une mesure injuste socialement ?

T. Piketty rejette les annulations de dette au motif que les créanciers seraient en majorité des petits épargnants qu'il serait injuste de faire payer, alors que les très riches n'auraient investi qu'une faible part de leur patrimoine dans les titres de la dette publique. Mais nous lui objectons que l’audit de la dette que nous préconisons a non seulement pour vocation d’identifier la dette légitime (c’est-à-dire la dette au service de l’intérêt général) de celle qui ne l’est pas, mais également d'identifier précisément les porteurs afin de pouvoir les traiter différemment selon leur qualité et le montant détenu. En pratique, la suspension de paiement  est la meilleure manière de savoir exactement qui détient quoi car les détenteurs de titres sont forcés de sortir de l’anonymat.

En Belgique la grande majorité de la dette publique est détenue par des investisseurs institutionnels (banques et assurances, fonds de pension,…) étrangers ou belges. Les petits porteurs (qui gèrent directement leur portefeuille de titres) ne représentent qu’une infime minorité des détenteurs de dettes publiques[3]. À l’occasion d’une annulation de dettes publiques, il conviendra de protéger les petits épargnants qui ont placé leurs économies dans des titres publics ainsi que les salariés et les retraités qui ont vu une partie de leurs économies   (épargne pension, assurance groupe, assurance vie) placé par les institutions ou les organismes gestionnaires dans ce même type de titres.

L’annulation des dettes illégitimes doit être supportée par les grandes institutions financières privées et les ménages les plus riches. Le reste de la dette doit être restructuré de manière à réduire drastiquement tant le stock que la charge de la dette. Cette réduction/restructuration peut notamment s’appuyer sur l’impôt  sur  le  patrimoine des plus riches comme évoqué par T. Piketty[4]. Annulation des dettes illégitimes et réduction/restructuration du reste de la dette doivent aller de pair. C'est un vaste débat démocratique qui doit décider de la frontière entre les épargnants petits et moyens qu'il faut indemniser et les gros qu'on peut exproprier. On pourrait alors mettre en place une taxe progressive sur le capital, frappant durement les très grandes fortunes, celles des 1 % les plus riches, dont T. Piketty a montré qu'ils possèdent aujourd'hui plus du quart de la richesse totale en Europe et aux États-Unis[5]. Cette taxe prélevée en une seule fois permettrait de terminer d'éponger l'ensemble des dettes publiques. Par la suite, une fiscalité fortement progressive sur les revenus et le capital bloquerait la reconstitution des inégalités patrimoniales dont Piketty estime à juste titre qu'elles sont antagoniques avec la démocratie.

Annulation de la dette : au bénéfice de qui ?

Si nous ne pouvons pas suivre T. Piketty quand il affirme que l’annulation de la dette « n’est pas du tout une solution progressiste », il a cependant raison de remettre en cause le type d’annulation partielle de dettes conçue par la Troïka (Commission européenne, BCE et FMI) pour la Grèce en mars 2012. Cette annulation a été conditionnée par des mesures qui constituent des violations des droits économiques, sociaux, politiques et civils du peuple grec, et qui ont enfoncé encore un peu plus la Grèce dans une spirale descendante. Il s'agissait d'une entourloupe visant  à permettre aux banques privées étrangères (principalement françaises et allemandes) de se dégager en limitant leurs pertes, aux  banques privées grecques d’être recapitalisées aux frais du Trésor public, et à la Troïka de renforcer durablement son emprise sur la Grèce. Alors que la dette publique grecque représentait 130 % du PIB en 2009, et 157 % en 2012 après l’annulation partielle de la dette, elle a atteint un nouveau sommet en 2013 :  175 % ! Le taux de chômage qui était de 12,6 % en 2010 s’élève à 27 % en 2013 (50 % pour les moins de 25 ans). Avec T. Piketty nous refusons ce type de « haircut » prôné par le FMI, qui vise seulement à maintenir en vie la victime pour pouvoir la saigner encore et toujours plus. L'annulation ou la suspension du paiement de la dette doit être décidée par le pays débiteur, à ses conditions, pour lui donner un vrai bol d'oxygène (comme l'ont fait par exemple l'Argentine entre 2001 et 2005 et l’Equateur en 2008-2009).

La dette et l'inégalité des fortunes ne sont pas les seuls problèmes

Graeber et Piketty s'opposent pour déterminer si c'est la dette ou l'inégalité des patrimoines qui est la cible politique prioritaire.  Mais pour nous, les problèmes que rencontrent nos sociétés ne se limitent pas au problème de la dette publique ni à celui de l'inégalité des fortunes privées. Tout d’abord, il est bon de rappeler – et Graeber le fait systématiquement –  qu’il existe une dette privée bien plus importante que la dette publique[6], et que l’augmentation brutale de cette dernière depuis cinq ans est due en bonne part à la transformation de dettes privées, celles des banques notamment, en dettes publiques. Ensuite et surtout, il faut replacer la question de la dette dans le contexte global du système économique qui la génère et dont elle n’est qu’un des aspects.

Pour nous, imposition du capital et annulation des dettes illégitimes doivent faire partie d’un programme bien plus vaste de mesures complémentaires permettant d'enclencher une transition vers un modèle post-capitaliste et post-productiviste. Un tel programme, qui devrait  avoir une dimension européenne tout en commençant à être mis en pratique dans un ou plusieurs pays, comprendrait notamment l’abandon des politiques d’austérité, la réduction généralisée du temps de travail avec embauches compensatoires et maintien du salaire, la socialisation du secteur bancaire, une réforme fiscale d’ensemble, des mesures pour assurer l’égalité hommes-femmes, le développement des services publics et de la protection sociale et la mise en place d’une politique déterminée de transition écologique.

Graeber met l'accent sur l'annulation de la dette car il croit, comme nous, qu'il s'agit d'un objectif politique mobilisateur ; mais il ne prétend pas que cette mesure se suffise à elle-même, et il s'inscrit dans une perspective radicalement égalitaire et anticapitaliste. La critique essentielle qu’on peut faire à Thomas Piketty est qu'il pense que sa solution peut fonctionner  en demeurant dans le cadre du système actuel. Il propose un impôt progressif sur le capital pour redistribuer les richesses et sauvegarder la démocratie, mais n’interroge pas les conditions dans lesquelles ces  richesses  sont produites et les conséquences qui en résultent.  Sa réponse ne remédie qu’à l'un des effets  du fonctionnement du système économique actuel, sans s’attaquer à la véritable cause du problème. Tout d'abord, admettons qu’on obtienne par un combat collectif une imposition du capital, à laquelle nous aspirons, les recettes générées par cet impôt risquent d’être largement englouties par le remboursement de dettes illégitimes si nous n’agissons pas pour leur annulation. Mais surtout, nous ne pouvons pas nous contenter  d’un partage plus équitable des richesses, si celles-ci  sont produites par un système prédateur  qui ne respecte ni les personnes ni les biens communs, et accélère sans trêve la destruction des écosystèmes. Le capital n'est pas un simple  « facteur de production » qui « joue un rôle utile » et mérite donc « naturellement » un rendement de 5 %, comme le dit Piketty, c'est aussi et surtout un rapport social qui se caractérise par l'emprise des possédants sur le destin des sociétés.  Le système capitaliste en tant que mode de production est à l’origine non seulement d'inégalités sociales de plus en plus insoutenables, mais de la mise en danger de notre écosystème, du pillage des biens communs, de rapports de domination et d’exploitation, d’aliénation dans la marchandise, d'une logique d’accumulation réduisant notre humanité à des femmes et des hommes incapables de sublimer, obsédés par la possession de biens matériels et oublieux de l’immatériel qui pourtant nous fonde.

La grande question que Piketty ne se pose pas, mais qui saute aux yeux de qui observe les rapports de pouvoir dans nos sociétés et l'emprise de l'oligarchie financière sur les États, est la suivante : quel gouvernement, quel G20 décidera d'un impôt mondial progressif sur le capital, sans que de puissants mouvements sociaux n'aient d'abord imposé le démantèlement du marché financier mondialisé et l'annulation des dettes publiques, instruments majeurs du pouvoir actuel de l'oligarchie ?

Comme David Graeber, nous pensons qu'il faudra imposer l’annulation des dettes sous « l’impulsion des mouvements sociaux ». C’est pourquoi nous agissons dans le cadre du collectif d’audit citoyen de la dette en Belgique[7] afin que l’annulation de la dette illégitime résulte d’un audit auquel les citoyens participent comme acteurs. Nous sommes cependant dubitatifs face à son idée selon laquelle « le mode de production actuel est fondé sur des principes moraux plus qu’économiques », car « le néolibéralisme a privilégié le politique et l’idéologique sur l’économique ». Pour nous, il n'y a pas d'opposition entre ces trois champs  mais il y a un système, le néolibéralisme, qui les articule à sa manière. Le capitalisme néolibéral n’a pas privilégié le politique et l’idéologique sur l’économique, il les a utilisés et mis au service de la recherche du profit privé maximum, avec un certain succès jusqu'à présent si l'on en juge d'après les données fournies par Piketty dans son ouvrage. Certes, ce système a engendré de monstrueux déséquilibres  – dont les dettes privées et publiques – et n'est pas compatible à terme avec une société émancipée, mais dans l'immédiat sa domination se perpétue.

Au-delà des divergences – secondaires avec Graeber, plus profondes avec Piketty –  que nous venons d’expliciter, nous sommes bien sûr prêts à emprunter ensemble le chemin de l’annulation des dettes illégitimes et de l’impôt progressif sur le capital. Lorsque nous arriverons à un carrefour dont une des voies indiquera la sortie du capitalisme, il nous appartiendra alors, tous ensemble, de reprendre le débat en tirant les leçons de l’expérience du chemin parcouru.

 

Nota Bene : Ce texte est une version adaptée à la Belgique de l’article « Annuler la dette ou taxer le capital : pourquoi choisir ? » rédigé par Thomas Coutrot (membre du Conseil scientifique d'Attac France), Patrick Saurin (un des porte-parole du syndicat SUD à la banque BPCE, la 4e banque en France) et Eric Toussaint (président du CADTM Belgique). La version originale a été publiée notamment sur le site de médiapart le 28 octobre 2013 (voir http://blogs.mediapart.fr/blog/cadtm/281013/annuler-la-dette-ou-taxer-le-capital-pourquoi-choisir et sur http://cadtm.org/Annuler-la-dette-ou-taxer-le  

 





[2] Voir le site www.strikedebt.org     
[3] Voir notamment Olivier Bonfond, Et si on arrêtait de payer, Bruxelles, Aden, 2012. http://www.aden.be/index.php?aden=et-si-on-arretait-de-payer
[4] T. Piketty, Le capital au XXIe siècle, Le Seuil, 2013, p. 887.
[5] T. Piketty, idem, p. 556.
[6] En 2011, dans la Zone Euro, la dette brute des États représentait 82 % du PIB, la dette des ménages 61 %, la dette des sociétés non financières 96 % et la dette des sociétés financières 333 % (Base de données Base de données de recherche Morgan Stanley : http://www.ecb.int/stats/money/aggregates/bsheets/html/outstanding_amounts_index.en.html
[7] Voir la « Déclaration pour le lancement du collectif d’audit citoyen de la dette en Belgique » http://cadtm.org/Declaration-pour-le-lancement-du

jeudi 17 octobre 2013


La prochaine réunion du Comité d'Audit de la dette de la région du Centre aura lieu le mardi 5 novembre 2013 à 18h30
CGSP rue du Temple 7 à 7100 La Louvière


Contacts: Jean-Marc Lauwers 0495/157.985 - Freddy Bouchez 0497/370.517

vendredi 11 octobre 2013

STOP A L’AUSTERITE ! STOP AU MASSACRE SOCIAL ! STOP A LA PAUVRETE !

Depuis 2007, l’austérité s’accentue en Belgique. Beaucoup de travailleurs avec ou sans emploi n’ont pas ou plus accès aux droits fondamentaux de l’article 23 de la Constitution. Pour travailler, se loger, se soigner, se nourrir, éduquer les enfants, se déplacer, se chauffer et s’éclairer, se cultiver, c’est la galère !
La pauvreté... augmente. Dans notre pays, 1/7 personne vit en dessous du seuil de pauvreté. Au 21ième siècle, c’est intolérable. Plus on avance dans le temps, plus on perd les acquis sociaux qu’avaient obtenus nos parents et nos grands parents.

LA DETTE, C’EST DE LA FAUTE DES BANQUES/C’EST NOUS QUI TRINQUONS !
Si la dette publique a explosé, c’est à cause du sauvetage des banques. Le gouvernement leur a donné 32,5 milliards alors qu’elles sont responsables du chaos. On sait maintenant par exemple que Dexia faisait des investissements risqués en connaissance de cause. A présent, au nom de cette dette, le gouvernement impose l’austérité à toute la population et à tous les services publics, jusqu’aux communes.

A LA LOUVIERE AUSSI, LA DETTE ET L’AUSTERITE FONT MAL !
1/3 personne seulement remplacée quand il y a départ à la retraite !
Les emplois statutaires sont en baisse au profit d’emplois précaires !
Diminution de services !
Augmentation des taxes sur la population (ex : sur les déchets, enlèvement des encombrants,…)
Des services qui étaient gratuits sont devenus payants ! (garderie d’écoles,…)

LES DIFFICULTES AUGMENTENT !
Fermeture de Duferco = 600.000 EUROS de perte pour La Louvière.
1 jeune sur deux est au chômage
Un peu plus de 20% de la population active est sans travail.
2000 personnes sont en attente de logements sociaux
Pas assez de places d’accueil pour les enfants
L’augmentation des exclusions à l’ONEM met en danger la politique sociale des CPAS

SE MOBILISER POUR DES SOLUTIONS !
Le 17 octobre, dans toutes les activités organisées à Namur à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la pauvreté, nous dirons que les moyens existent pour que tout le monde puisse avoir accès aux droits fondamentaux (travail, logement, déplacement, se nourrir, éducation, culture, santé,…). Nous dirons également que les communes doivent avoir les moyens d’organiser des services de qualité accessibles à toute la population.

En prenant l’argent où il est, c’est possible !
- Récupérons les 32,5 milliards donnés aux banques par le gouvernement !
- Réinstaurons un impôt plus progressif sur les très hauts revenus ! (615 millions)
- Donnons les moyens au ministère des finances pour qu’il puisse combattre la fraude fiscale (20 milliards/an)
- Supprimons les intérêts notionnels (3,5 milliards) et créons un impôt sur les grosses fortunes (8 milliards)

EN REPARTISSANT LES RICHESSES EQUITABLEMENT, ON POURRAIT ELIMINER LA PAUVRETE ET REFINANCER LES SERVICES PUBLICS COMMUNAUX !
Le 17 octobre à Namur, participons tous et toutes à la journée mondiale de lutte
contre la pauvreté : manifestations, interpellations politiques, théâtre et débats
dès 14 heures à Namur à l’initiative du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté.

DEPART COLLECTIF ORGANISE PAR LE COMITE D’AUDIT CITOYEN DE LA DETTE DE LA REGION DU CENTRE ET LE GROUPE DES TRAVAILLEURS SANS EMPLOI DE L’ASBL CEPRé. RENDEZ-VOUS A 12 H 30 A LA GARE DU SUD DE LA LOUVIERE

Pour le retour, train toutes les h29’ de la gare de Namur vers la gare de La Louvière.

jeudi 26 septembre 2013

Refiler la facture aux habitants, ça suffit !


Le 12 octobre, une action sera organisée dans les rues de La Louvière pour l’annulation des dettes illégitimes qui mettent notamment les services publics communaux en danger !

Rendez-vous à 10 h 30 dans le piétonnier, en face de la banque Belfius.


 


Renseignements auprès de Jean-marc Lauwers au 0495/157985 ou de Freddy Bouchez au 0497/370517.
 

Annulation des dettes illégitimes !
 

Depuis 2007, partout en Europe, les plans d’austérité se succèdent. La Belgique n’échappe pas à cette règle. Il faudrait couper dans la sécurité sociale, couper dans les services publics, couper dans l’index, couper dans les soins de santé, l’éducation, la culture, couper dans les pensions, couper dans les chômeurs,… Et tout cela, à cause de la dette publique car soi-disant, nous aurions vécu au-dessus de nos moyens !
 
La dette, c’est de la faute des banques, mais c’est nous qui trinquons !

Comment peut-on dire que nous avons vécu au-dessus de nos moyens alors que les dépenses publiques sont restées stables de 1980 à 2010. En moyenne à 43% du Produit Intérieur Brut (source www.onveutsavoir.be)
 

Si la dette publique a augmenté, c’est surtout à cause du sauvetage des banques. En Belgique, ce sauvetage a provoqué une augmentation de la dette publique de 32,5 milliards. Alors que celle-ci est le résultat d’une socialisation de dettes de la finance privée qui a pratiqué des politiques de spéculation, elle est mise à charge de la population par le gouvernement qui nous impose une austérité féroce qui attaque le droit aux allocations de chômage, les droits à la pension et à la prépension, qui diminue les moyens financiers de tous les services publics, notamment ceux de la SNCB et de bpost. Cette politique d’austérité touche en cascade tous les niveaux de pouvoir. Les gouvernements régionaux et les communes réduisent aussi leurs dépenses. Dans certaines villes, il y a déjà eu des licenciements. La politique sociale risque d’être fortement touchée puisque les CPAS annoncent une chasse à la fraude sociale qui risque de mettre en difficulté les gens qui ont les plus faibles revenus. Et cela alors qu’une personne sur sept vit déjà en dessous du seuil de pauvreté.

A la Louvière aussi, la dette et l’austérité font mal :

La crise économique et sociale, les politiques d’austérité font que les subsides fondent comme neige au soleil. Des contrats de travail liés à des projets précis et qui dépendent de subsides des gouvernements fédéral et wallon, sont en danger. Les possibilités d’emplois diminuent fortement puisqu’une personne seulement sur trois sont remplacées quand il y a départ à la retraite. L’emploi statutaire est en baisse au profit  des emplois précaires et contractuels. Les économies de fonctionnement font mal et provoquent chez les agents communaux, une augmentation d’un mal être au travail. L’impact des politiques d’austérité a également comme conséquences sur la Ville de La Louvière comme sur les autres communes, la diminution de services, une augmentation de certaines taxes comme celle sur les déchets, le paiement de services qui étaient gratuits.

La crise économique et particulièrement la fermeture de Duferco fera perdre  à la Ville de La Louvière six cents mille euros. A La Louvière, seulement soixante mille euros de taxes proviennent des banques sur un budget total de plus ou moins 117 millions. Par contre, les parts prises dans Dexia et qui devaient rapporter 13% d’intérêt, vu la crise de cette banque, provoquera une perte d'au moins une dizaine de millions d'euros. Les difficultés s’accumulent : un jeune sur deux est en chômage et globalement, c’est un peu plus de 20% de la population active qui est sans travail. Il y a d’énormes besoins sociaux qui ne sont pas rencontrés, notamment dans le domaine du logement où il n’y a pas de nouvelles constructions alors que deux mille personnes sont en attente. Il faudrait aussi répondre à la demande d’augmentation de places d’accueil pour les enfants par exemple par la création de nouvelles crèches. 

Toutes les communes sont en difficulté :

La crise des banques et les politiques d’austérité mettent toutes les communes en péril. Les restrictions budgétaires dans celles-ci, dont la réduction du fond des communes, auront des répercussions très négatives sur les populations puisque l’on sait que 50% de la totalité des investissements publics proviennent des communes. Le démantèlement du droit aux allocations de chômage a provoqué une augmentation du nombre de chômeurs exclus par l’ONEM. Cela a coûté à l’ensemble des CPAS la somme de cinquante deux millions.

Les décisions du gouvernement fédéral de gel des salaires pendant six ans, la manipulation de l’index dont on reparle actuellement, constitueront aussi un gel des rentrées pour le service public communal. L’impact de la dette fédérale sur les communes, c’est 8,9 milliards par an. Beaucoup de communes, comme les autres services publics, sont en souffrance. 2013 sera sans doute « l’année la plus facile » des six ans qui viennent !

Se mobiliser pour imposer d’autres solutions :

Les citoyens doivent reprendre la parole. Pour retrouver des politiques positives en faveur des gens et de l’environnement dans nos communes, il faut prendre l’argent où il est ! Il faut déculpabiliser la population qui n’a pas vécu au-dessus de ses moyens, bien au contraire. D’autres solutions sont possibles à commencer par l’annulation des parties illégitimes de la dette. Les 32,5 milliards que le gouvernement a distribués aux banques devraient être effacés de l’ardoise car il s’agit bien là d’une socialisation de dettes de la finance privée qui est mise à charge de la population. L’annulation de la partie illégitime de la dette doit s’accompagner de mesures qui permettent de générer des recettes supplémentaires pour l’Etat Belge, c’est-à-dire aussi pour nos communes et des politiques sociales qui permettraient à toutes et tous de vivre bien. Si la Belgique veut vraiment faire diminuer la pauvreté (notre gouvernement s’est d’ailleurs engagé à le faire auprès de l’UE) il peut décider de répartir équitablement les richesses en :

-       Réinstaurant un impôt plus progressif (réinstaurer des tranches à 52,5%, 55% pour les revenus situés entre 70.000 et 165000 euros bruts par an) et 65 % (au-dessus de 165.000 euros) rapporterait 615 millions (source : www.onveutsavoir.be)

-       Supprimant les intérêts notionnels, en luttant plus efficacement contre la fraude fiscale et en taxant les plus values sur action, on pourrait engendrer 12 milliards de recettes dans les caisses de l’Etat  (source : www.onveutsavoir.be)

Court métrage animé qui permet de bien comprendre les origines de la dette en Belgique